G8 Information Centre, Online Lectures 2002

Revised Tuesday, 16-Dec-2003 12:34:01 EST English | Commentaires | Contactez-nous | Centre d'information sur le G8

26. Contribution du Sommet de Kananaskis à la collectivité mondiale, John Kirton (présentation par Michele Dubois)

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Questions à débattre / Exercise
Biographie de l'instructeur

Au cours de cette dernière leçon, " Vers le cinquième cycle du sommet ", nous évaluerons les résultats obtenus par les membres du G8 lors du quatrième cycle de sept ans, lequel a pris fin à Kananaskis. À partir de cela, nous verrons comment le G8 devrait évoluer lors de son cinquième cycle qui débutera l'an prochain en France.

L'analyse préliminaire des résultats et de la portée du Sommet de Kananaskis a permis d'obtenir quatre points de vue différents sur la façon dont les conférences au sommet du G8 se dérouleront. Une école de pensée a semblé prendre forme à la suite des commentaires du président français Jacques Chirac, qui a suggéré, après le sommet de Séville de l'Union européenne tenu tout juste avant celui de Kananaskis, que les dirigeants se rencontrent désormais par visiophone et non en personne. Stimulés par une avalanche de critiques portant sur l'inefficacité du Plan d'action pour l'Afrique du G8, les observateurs qui partagent cette opinion ont laissé entendre que Kananaskis marquait la fin d'une époque et que l'influence du G8 en tant que forum efficace de gouvernance mondiale allait s'amenuiser au cours des années à venir (Cerretelli 2002). Les adeptes d'une deuxième école de pensée ont indiqué que Kananaskis a tout juste servi à confirmer le statu quo maintenu par le G8; ils ont en outre souligné qu'il valait encore la peine de procéder à des sommets du genre mais que, pour qu'ils aient une incidence appréciable, les dirigeants devaient s'efforcer de respecter leurs engagements davantage que par le passé. Les disciples d'une troisième école, faisant allusion à Chirac qui a louangé, à la fin du Sommet de Kananaskis, le caractère personnalisé, paisible, informel et significatif du nouveau modèle de rencontres canadien, ont insisté sur le fait que l'avenir des sommets du G8 s'avérait prometteur, car, selon eux, cette ploutocratie fermée est nécessaire à la gouvernance économique du monde tourmenté dans lequel nous vivons. Enfin, les partisans d'une quatrième école de pensée, tout en évoquant la décision de Kananaskis visant à faire de la Russie un membre à part entière du G8 et à faire participer les Africains aux discussions en tant que membres égaux, ont laissé entendre que le G8 allait devenir le foyer de la gouvernance mondiale, et ce grâce au rôle central que joueront les principes de la démocratie ouverte et du partenariat mondial.

Dans cet exposé de clôture de l'initiative G8 en ligne 2002, je démontrerai que le G8 continuera de se démarquer en tant que forum efficace de gouvernance mondiale, et que la démocratie ouverte ainsi que le partenariat mondial constituent le fondement même de son développement institutionnel et de la concrétisation de ses principes idéologiques. Ses réalisations croissantes au cours de son quatrième cycle, allant de 1996 à 2002, lui ont procuré l'élan, l'assurance et la crédibilité requises pour relever les défis de l'avenir tout en restant sur la bonne voie. Le sommet prometteur qui se tiendra en France en 2003 devrait permettre au G8 de tenir son cap. Ensuite, le G8 pourra, à long terme, réaliser facilement son plein potentiel s'il prend les bonnes décisions concernant certaines questions délicates auxquelles il sera confronté au cours du prochain cycle, lequel aboutira au prochain sommet tenu par le Canada en 2010.

A. Élan procuré par le quatrième cycle

Au cours de son quatrième cycle de 1996 à 2002, le G7/G8 a bénéficié d'un élan considérable et s'est illustré en tant qu'organisme favorisant un partenariat ouvert et concerté de démocraties en plus d'assurer une gouvernance mondiale efficace en ce début du 21e siècle. Les notes que Nicolas Bayne (2002) a données au G7/G8 pour les résultats obtenus lors des sommets annuels ont atteint une moyenne historique de B au cours du quatrième cycle, les cinq derniers sommets ayant reçu une série de B ou de B+ sans précédent. Le nombre moyen d'engagements concrets pris à chaque sommet annuel a augmenté de façon constante, passant de 35 lors du premier cycle (de 1975 à 1981) à 45 au deuxième cycle (de 1981 à 1988), à 59 au troisième cycle (de 1989 à 1995) et au chiffre impressionnant de 131 au quatrième cycle (de 1996 à 2002). Les 191 engagements pris à Kananaskis constituent donc un record pour le G7/G8 en 28 ans d'existence; le deuxième plus haut total, qui est de 169 engagements, remonte au sommet d'Okinawa tenu en 2000 (Walkom 2002). Ce sont donc les bons résultats d'Okinawa et de Kananaskis, et non le piètre total de 58 engagements pris à Gênes en 2001, qui illustrent la tendance des sommets du G8 au 21e siècle.

Pour ce qui est de la question délicate du respect des engagements pris par le G8, c'est-à-dire la capacité de tenir ses promesses, la tendance est également à la hausse. Sur une échelle allant de -100 % à +100 %, le respect moyen des engagements du G8 a augmenté, passant de +32 % pendant les deux premiers cycles à 43 % lors des deux derniers; en outre, le sommet d'Okinawa, avec +81 %, et celui de Gênes, avec 50 %, ont donné une indication de la prochaine tendance. On a également assisté à une institutionnalisation de plus en plus intense du G7/G8, qui n'a tenu aucune réunion autonome des ministres au cours du premier cycle, mais en a organisé trois au cours du deuxième cycle, quatre au cours du troisième cycle et quatre au cours du quatrième cycle. Peut-être que la prolifération des théories sur les ambitions du G7/G8 est l'élément le plus marquant de son histoire. Le rôle innovateur du G7/G8, qui consiste à faire la promotion de la démocratie ouverte, des libertés individuelles et du progrès social à l'échelle planétaire, s'est étendu, au cours du quatrième cycle, à l'application de la gouvernance de la mondialisation, à condition que cette tâche se fasse dans le respect des collectivités et le partage équitable des ressources nécessaires. Cette évolution a permis au G8 de conclure un nouveau partenariat avec l'Afrique en 2002 lors du Sommet de Kananaskis qui clôture le quatrième cycle de conférences de l'organisme.

2. Perspectives du sommet de 2003 en France

On sait d'ores et déjà que le sommet de 2003, en France, permettra au G8 de continuer sur sa lancée du quatrième cycle qui s'est précisée à Kananaskis en 2002. L'hôte Jacques Chirac a confirmé qu'il se conformera au modèle canadien et qu'il tiendra un sommet intime, informel, significatif et réservé aux dirigeants. Il axera les discussions une fois de plus sur un thème unique, à savoir le développement de l'Afrique. En invitant les autres dirigeants du G8 à un sommet de l'Union européenne et de la Russie à Saint Pétersbourg le jour précédant l'ouverture officielle du G8, il s'efforcera de faire participer davantage de dirigeants des démocraties de l'ouest, comme Kananaskis l'a fait avec les démocraties de l' est et du sud, aux activités du G8.

En outre, le sommet français assurera inévitablement la continuité de Kananaskis et en perpétuera l'héritage, ce qui n'a pas été fait à Halifax en 1995 lorsque la France a assumé le rôle d'hôte pour le sommet de 1996. En adoptant à Kananaskis un ordre du jour " intégré ", les dirigeants du G8 se sont assurés de revenir l'an prochain sur la mise en oeuvre de leur Plan d'action pour l'Afrique ainsi que sur les progrès, les lignes directrices et les projets liés au Partenariat mondial du G8 contre la prolifération des armes de destruction massive et des matières connexes, en plus de l'action coopérative sur la sécurité dans les transports. Afin d'institutionnaliser cette continuité, les dirigeants ont mis sur pied plusieurs organismes et instauré diverses mesures : une deuxième année de travail à l'intention de leurs représentants personnels pour l'Afrique, un mécanisme d'examen annuel du partenariat mondial, un nouveau groupe du G8 sur la sûreté et la sécurité nucléaires ainsi que des spécialistes de la sécurité dans les transports qui recevraient des directives des chefs du G8 pour mener un examen semi-annuel. L'ensemble de ces ajouts laisse supposer que la France s'oppose nettement moins maintenant à l' " institutionnalisation " des sommets du G8. Pour ce qui est de l'avenir à long terme, on a établi à Kananaskis une séquence des pays hôtes qui ne s'applique pas seulement à l'année suivante, comme c'était le cas auparavant, mais aux huit années à venir, soit jusqu'en 2010. L'avenir n'est donc pas si sombre pour une institution qui a décidé de croître au lieu de marquer le pas ou de péricliter.

C. Potentiel et défis à long terme

Afin de retirer le maximum de ce parcours ambitieux, les dirigeants du G8 devront affronter et parvenir à surmonter plusieurs défis cruciaux au cours du cinquième cycle de conférences au sommet qui se prépare.

Le premier défi consiste à assurer une participation plus concertée ainsi qu'à miser sur l'intégration des dirigeants des démocraties de l'est, du sud et de l'ouest et sur les liens qui peuvent être établis avec ces nations. Pour ce faire, la première étape consistait à inviter les dirigeants africains présents à Kananaskis à participer de nouveau aux travaux du G8 aux côtés des grandes puissances démocratiques d'autres régions en développement. Même s'il peut sembler illusoire de s'attendre au retour du " dinner club de Paris ", créé par la France en 1989, ou de mettre sur pied un G20 de chefs d'État, l'intégration de l'Inde, pays en plein essor et foncièrement démocratique, devra se faire tôt au tard au cours des huit prochaines années (Kirton, Daniels et Freytag, 2001). Le fait d'inviter l'Inde à participer au G20 de 2003 à titre de président serait un pas dans la bonne direction.

Une justification de la sorte aiderait à résoudre le principal défi à relever concernant l'ordre du jour des sommets du G8, à savoir la nécessité de traiter de façon plus exhaustive qu'à Kananaskis les questions économiques et financières fondamentales, et ce même dans le cas des principales réalisations liées au développement et à la sécurité politique. En fait, Kananaskis a eu lieu pendant que le scandale d'Enron contaminait les grandes entreprises américaines, que le jadis puissant dollar américain chutait et que la crise financière affligeant l'Argentine se répandait en Uruguay, au Paraguay, au Brésil, au Venezuela et même jusqu'en Turquie et en Russie. On risquait donc d'assister à une reprise du dernier sommet du G8 tenu dans les Rocheuses, soit celui de Denver en 1997, au cours duquel, en raison de toutes les préoccupations entourant la Russie et l'Afrique, on n'a pu déceler et prévenir la crise économique qui a débuté en Thaïlande trois semaines à peine après la tenue du sommet.

Pour ce qui est de l'avenir, les répercussions déjà réduites de la rencontre des dirigeants du G7 à Kananaskis vont tomber dans l'oubli graduellement à mesure que nous nous approcherons de l'échéance de 2006, date à laquelle la Russie sera l'hôte du G8. Il pourrait en être de même pour toutes les grandes questions économiques et financières à l'ordre du jour, à moins que d'importants efforts ne soient déployés afin d'assurer la participation à part entière des Russes et afin d'inclure tous les membres à ce processus complexe. Pour les dirigeants, la solution évidente consiste à s'accorder plus de temps, ce qui veut dire qu'ils doivent abandonner la formule du marathon de 30 heures sans sommeil mise de l'avant à Kananaskis pour revenir à un sommet normal étalé sur trois jours.

Un sommet plus long et moins intensif aurait également comme avantage de permettre aux dirigeants de laisser une plus grande place à la société civile, comme lors du sommet d'Okinawa, tenu au Japon en 2000, où l'on a assisté à de nombreuses manifestations non violentes. Il est nécessaire d'améliorer l'intégration de la société civile et des dirigeants du G8 dans leur ensemble afin que les sommets puissent réaliser leur plein potentiel au cours des années à venir.

Une société civile plus engagée pourrait constituer un véritable atout lors des étapes délicates de la mise en oeuvre et de l'exécution des plans prévus. Son rôle est particulièrement important pour une institution comme le G8 qui ne dispose pas de secrétariat, et qui ne doit pas en avoir, car il compte sur les interventions volontaires de ses sociétés et de ses gouvernements démocratiques nationaux. Une mise en oeuvre efficace qui s'inscrirait dans un contexte politique pourrait également bénéficier d'une institutionnalisation accrue du G8; les premières étapes de ce processus seraient évidemment des forums ministériels axés sur le développement et la sécurité. Autrement, il serait logique qu'un G8 qui se consacre à la promotion de la démocratie ouverte et de la primauté de la loi cherche à intégrer ses pouvoirs législatifs et judiciaires.

Enfin, dans un monde où dominent d'imposantes organisations internationales de " règle absolue " mises sur pied au milieu du 20e siècle pour des sociétés qui ont beaucoup changé depuis, le G8 devra aborder de nouveau la question mise en lumière à Halifax en 1995, à savoir les nouvelles institutions de gouvernance mondiale qui doivent être créées pour nous permettre de relever les défis du 21e siècle. À mesure que son architecture et ses activités changent afin que l'accent soit mis sur la gouvernance mondiale réelle, le G8 devra concevoir et présenter une nouvelle génération d'institutions internationales cohérentes et complètes pour un monde où la mondialisation ne cesse de s'accélérer.

Voilà qui met un terme à notre leçon ainsi qu'à notre cours sur le G8 en ligne de 2002. Je suis ravi d'avoir pu examiner avec vous les défis liés à la mondialisation, à la gouvernance mondiale ainsi qu'au rôle du G8. Je vous souhaite la meilleure des chances dans vos découvertes intellectuelles ultérieures. N'hésitez pas à communiquer avec nous par le biais de nos babillards du G8 en ligne à l'adresse www.g8online.org, ou grâce à notre Centre d'information sur le G8 à l'adresse www.g8.utoronto.ca.

Au revoir et merci.

Références

À venir

Documents supplémentaires suggérés

BAYNE, Nicholas. " Impressions of the Kananaskis Summit, 26-27 June 2002 ", le 29 juin 2002 (ébauche). www.g8.utoronto.ca/g7/evaluations/2002kananaskis/assess_baynea.html (juin 2002).

CERRETELLI, Adriana. " Gratuitous Optimism Has Shed Its Mask ", Il Sole 24 Ore, le 29 juin 2002.

KIRTON, John, Joseph DANIELS et Andreas FREYTAG. Guiding Global Order: G8 Governance in the Twenty-First Century (Ashgate: Aldershot), 2001.

WALKOM, Thomas. " G-8 Summit Much Ado About Very Little ", Toronto Star, le 2 juillet 2002, p. A25.

Questions à débattre

  1. Qu'est-ce que le G8 a accompli avec plus d'efficacité au cours du dernier cycle que lors des précédents? Pourquoi?

  2. Est-ce que le succès du Sommet de Kananaskis a vraiment fait oublier les " fantômes de Gênes " pour ainsi donner au G8 l'élan dont il aura besoin dans les années à venir? Si tel est le cas, comment? Sinon, pourquoi?

  3. Est-ce que Jacques Chirac peut être aussi efficace que Jean Chrétien et perpétuer la réussite de Kananaskis tout en étant dans la note? Dans l'affirmative ou la négative, pourquoi?

  4. Est-ce que le sommets ultérieurs du G8 devraient tenter d'intégrer plus de dirigeants de pays démocratiques et plus de dirigeants de diverses régions de la planète, que ces pays soient démocratiques ou non, ou encore des dirigeants d'organisations internationales? Dans l'affirmative ou la négative, pourquoi?

  5. Quand, pourquoi et à quelles conditions l'Inde devrait-elle commencer à participer de façon régulière aux sommets du G8?

  6. Si le G8 n'existait pas actuellement, est-ce qu'il faudrait l'inventer? Si tel était le cas, quelle forme prendrait-il? Sinon, pourquoi?

Exercice

  1. Le dernier sommet de l'Union européenne a eu lieu à:
    1. Kananaskis (Canada)
    2. Saint Pétersbourg (Russie)
    3. Gotenburg (Suède)
    4. Séville (Espagne)

  2. Le sommet du G7/G8 où l'on a pris le plus d'engagements concrets est celui de:
    1. Kananaskis en 2002
    2. Okinawa en 2000
    3. Rambouillet en 1975
    4. Gênes en 2001

  3. Les dirigeants du pays hôte du G8 ont rencontré des représentants de la société civile sur place lors du Sommet de:
    1. Denver en 1997
    2. Halifax en 1995
    3. Okinawa en 2000
    4. Gênes en 2001

  4. La réforme des institutions internationales visant à répondre aux besoins du 21e siècle était le thème central du sommet du G7/G8 tenu à:
    1. Paris en 1989
    2. Halifax en 1995
    3. Gênes en 2001
    4. Kananaskis en 2002