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University of Toronto

Conférence de press de M. François Mitterrand, Président de la République,
à l'issue du XVe sommet des pays industrialisés

16 juillet 1989, Paris
[Engish]

Le Président.- Mesdames, Messieurs, bonjour. Maintenant, ce sont les journalistes qui vont s'exprimer. Je crois avoir assez parlé, plus que je ne l'aurais souhaité, mais je suis obligé de vous rendre compte d'un document fort important et copieux.

Vous l'avez entendue, je pense, cette lecture... non pas cette lecture, mais résumé.

Vous avez dû noter, au passage, les points qui vous intéressent.

Donc, je ne vais pas inventer un nouveau préambule et dès maintenant, je vais vous demander de bien vouloir poser les questions de votre choix.

Question.- Monsieur le Président, je voudrais commencer par l'article 1er où vous dites que le Sommet de l'Arche marque le début d'un nouveau cycle de sommets. Est-ce que vous pourriez nous préciser, nous commenter cette affirmation, assez étonnante à première vue puisque d'avance, on ne sait jamais si on commence un premier cycle.

Le Président.- Je vous exprime une décision et une remarque, fruit des travaux des Sept. C'est écrit en toutes lettres là et je ne suis pas l'auteur de ce document. J'y ai simplement souscrit en tant que participant.

Il a été considéré, de façon générale, que nous étions arrivés par rapport aux travaux de quinze ans, à un certain terme. Le cycle débutant en 1982 correspondait à l'une des plus longues périodes de croissance depuis la seconde guerre mondiale.

Le premier était celui de Rambouillet, en 1975. Donc 1975, 1982, 1989. Difficile de prévoir, vous avez raison, mais il me semble que l'on soit maintenant parvenu à une période différente. On pourrait dire que grosso modo les Sommets sont parvenus aux résultats qu'ils désiraient et ils observent à la fois les acquis dans la lutte contre l'inflation, dans la lutte pour une reprise de la croissance, dans l'organisation d'un minimum, je ne dirais pas de système, mais de politiques mondiales monétaires. Et on aperçoit aujourd'hui à la fois des progrès et un certain nombre de menaces, par exemple sur l'inflation. L'inflation était jugulée, et puis, elle ne l'était pas. Il semble donc bien que ce soit une période d'acquis et de reprise de responsabilité là où certains fléchissements apparaissent, avec un élargissement du domaine de nos réflexions et de nos décisions au domaine de l'environnement, de la lutte contre la drogue. Tout cela, indépendamment des résolutions politiques qui sont déjà connues de vous. Et je crois que la dimension environnement et que la dimension développement prennent aujourd'hui une nouvelle valeur et s'élargissent assez pour que l'on considère que les Sommets prennent une autre tournure.

Le temps consacré à la dette et au développement -- la dette n'étant qu'un aspect particulier du développement -- et le problème de l'environnement proprement dit n'ont jamais été l'objet d'autant de conversations et d'un aussi grand nombre de décisions ou d'intentions affirmées que cette fois-ci.

Voilà comment j'interprète cette notion de troisième période.

Question.- Monsieur le Président, comment voyez-vous les rapports Est-Ouest, notamment avec l'Union Soviétique, après le Sommet? Comment pourraient-ils évoluer? Deuxiéme question: quelles ont été les réactions du Sommet à la lettre adressée par le Président Gorbatchev?

Le Président.- Le Sommet n'a pas changé en profondeur la nature des relations entre l'Union Soviétique et les participants du Sommet. Ça n'était d'ailleurs pas l'objet de ce Sommet.

D'autre part, la lettre qui m'était adressée, que j'ai aussitôt communiquée aux membres du Sommet et qui a d'ailleurs été communiquée très rapidement à la presse, cette lettre n'appelle pas de réponse collective. Notre ordre du jour était déjà extrêmement rempli et il n'y a donc pas de réponse au Sommet de l'Arche à M. GORBATCHEV. Cependant, je lui répondrai, nourri et inspiré par les considérations que j'ai entendues car nous en avons quand même parlé, surtout hors séance.

Nous avons voulu nous en tenir à notre ordre du jour. Je répondrai donc prochainement au Président GORBATCHEV. Quant à la nature des relations, elle n'a pas fondamentalement changé et diverses résolutions sur les relations Est-Ouest vous ont été communiquées hier. Nous souhaitons la réussite de l'entreprise de démocratisation en Union Soviétique. Nous saluons le courage de cette entreprise. Nouse ne sommes pas chargés d'en assurer la réussite mais, dans la mesure où nous pourrions le faire, nous y contribuerions. Mais les aspects de cette gestion sont de tous ordres: économique, politique, militaire et d'autres avancées sérieuses doivent être accomplies surtout sur le plan du désarmement avant que l'on puisse tirer des conclusions de caractère général. En tout cas, les dispositions des puissances réunies au cours de ce Sommet sont tout à fait ouvertes pour développer les relations, faciliter les échanges, permettre les évolutions qui seront significatives d'une plus grande liberté.

Question - M. le Président de la République, nous vous avons entendu tout à l'heure, pendant une cinquantaine de minutes, détailler les différents points du communiqué. Il y a eu également comme vous le signaliez, les déclarations politiques qui ont été prises hier. Alors, je voudrais vous demander si vous le voulez bien, de pratiquer l'exercice résolument inverse. S'il devait y avoir à votre avis un élément qui reste de ce Sommet, lequel serait-il?

Le Président - D'abord, ce travail c'est le vôtre.....mais je veux bien répondre à votre question, habitué que je suis à nos dialogues que vous rendez habituellement constructifs.

Moi, mon impression personnelle, c'est une plus grande résolution de protéger les acquis de la politique, comme je le répondais à M. FABRA tout-à-l'heure. La politique économique suit, depuis l'origine, l'expression de cette vigilance dont j'ai fait état également, et donc l'appel à une plus grande coordination sur le plan économique. Mais il me semble que la note apportée à l'examen des problèmes de relations entre le Nord et le Sud et, particulièrement, de l'endettement, ressort de la masse des travaux. Il va y avoir maintenant d'une part de l'argent frais, la Banque Mondiale et le Fonds Monétaire International qui vont contribuer de façon importante à la réduction de l'encours et du service de la dette, d'autre part une multitude d'approches concrètes, souvent au cas par cas, on cite les Philippines, on cite le Bangladesh. Mais on pourrait citer beaucoup d'autres pays. Il y a donc une attention et une prise de conscience des problémes du développement et de l'urgence des décisions. Hier, il s'agissait même d'une aide alimentaire urgente à un pays comme la Pologne. Je crois que, décidément, le problème des relations entre les pays riches et les pays pauvres est enfin entré dans la conscience des pays industriels les plus avancés. Et cela les conduira à adopter des politiques communes autant qu'il sera possible, à encourager les efforts particuliers, par exemple: les renoncements aux créances, les rééchelonnements et les moratoires de toutes sortes, avec la nécessité d'envisager non seulement le sort des pays les plus pauvres mais également celui des pays dits intermédiaires dont les problèmes ne se résolvent pas simplement, ne se réduisent pas à des questions d'argent, et qui ont besoin aussi de garanties de toutes sortes, d'accompagnement des échanges.

La troisième observation, c'est l'intrusion soudaine et considérable des problèmes de l'environnement sur lesquels un luxe de réponses a été apporté.

Donc ce sera trois idées.

Les pays industriels avancés veulent consolider les acquis, s'inquiètent des fluctuations qui ne vont pas toujours dans le bon sens, se coordonnent.

Les problèmes de l'endettement et des relations Nord-Sud entrent de plein fouet dans nos délibérations et l'environnement est désormais considéré comme une donnée humaine, économique et politique primordiale.

Je ne voudrais pas oublier les éléments que vous avez dû remarquer vous-même mais je ne veux pas alléger trop ma réponse. De la même manière ont été abordés les problèmes de la drogue.

Question - M. le Président, vous avez dit récemment que la France était l'avocat des pauvres. Il y avait des représentants des pays pauvres aussi à Paris cette semaine.

Est-ce que vous croyez que vous avez réussi à commencer au moins un dialogue Nord-Sud, même si l'idée un Sommet aura été refusée?

Le Président - La France ne se pose pas en unique avocat et défenseur des pays pauvres, mais elle entend prendre sa place dans la défense des justes intérêts de ces populations. Par rapport à toute une série de questions, je pourrais en citer certaines.

Une augmentation des quote-parts du Fonds Monétaire International et même une nouvelle amélioration des droits de tirage spéciaux, sur lesquels des polémiques s'étaient élevées lors de mes propositions devant les Nations Unies, restent en cours d'examen au conseil d'administration du Fonds Monétaire International. Et en réponse à la question que j'ai posée, je l'ai dit tout à l'heure, la Banque Mondiale et le Fonds Monétaire International fournissent des apports nouveaux.

Je pourrais continuer la liste, elle est longue, de toutes les réponses favorables qui ont été faites aux questions que nous posions. J'en ai là une liste, mais pour ne pas alourdir cette conversation elle vous sera fournie, c'est un document qui vous sera remis.

Maintenant, la demande m'a été faite par quatre pays de convaincre mes collègues de parvenir à une confrontation des points de vue au sein d'une conférence dont les contours n'ont pas encore été précisés. Ils en avaient d'abord parlé à nos partenaires, ce n'est pas sorti comme cela tout d'un coup. M. GANDHI avait longuement vu Mme THATCHER, d'autres s'étaient longuement entretenus, M. MOUBARAK ou M. PERES, M. GANDHI avec le Président BUSH...ce n'est pas sorti comme cela par miracle et par suprise.

Mais au fond, sachant les obstacles et les arguments réservés à l'égard d'une sorte de conférence Nord-Sud, et même d'une conférence limitée à un certain nombre de participants du type CANCUN, j'ai bien l'intention de poursuivre cette démarche et de convaincre celles et ceux d'entre nous qui pourraient avoir des réticences, bien que je sois moi-même tout à fait raisonnable car je considère que ce qui a été finalement l'échec de CANCUN, qui avait été convoquée avant mon accession à la Présidence de la République--cela a été la première après mon élection en 1981-- c'est-à-dire son absence de suite, a été dommageable à la cause qu'elle entendait servir.

Il faut donc se méfier de toute réunion diplomatique improvisée ou prématurée. Il n'empêche que j'entends poursuivre cette démarche dont j'ai entretenu mes collègues.

Question - A ce sujet, Monsieur le Président, "vous en avez parlé à vos collègues", est-ce que vous avez pu constater que certains marquaient un début de conviction? Est-ce que leurs réticences ont été ébranlées?

Le Président - D'une façon générale, on souhaite apporter une réponse au problème du développement. C'est un pas qui a été franchi et les dispositions pratiques qui vous seront communiquées sont nombreuses et importantes.

De là à franchir le pas qui va vers une conférence qui se déroulerait dans le cadre des institutions existantes, les grandes institutions internationales, il ne s'agit pas d'inventer une institution nouvelle, il s'agit d'une rencontre....J'ai dit tout à l'heure que cette démarche serait poursuivie, en tous cas par moi-même. Elle fait des progrès, elle n'est pas acquise.

Tout à l'heure, j'ai entendu M. BROMBERGER parler de mes 50 ou 55 minutes. Croyez-moi, je suis l'interprète fidèle des travaux d'un Sommet, et encore j'ai résumé. Je ne sais pas si vous vous êtes rendu compte de mon effort? Non? Il ne semble pas. Eh bien si, pourtant oui, j'ai réduit, résumé et j'ai peut-être même aussi omis quelques details qui vous auraient été utiles. Vous me le pardonnerez. Vous pouvez me pardonner sur ce point, sans quoi cela aurait été plus long.

Question - Monsieur le President, maintenant que le Sommet est terminé, quel jugement portez-vous sur ceux qui en France ont critiqué la proximité des fêtes du Bicentenaire et du Sommet?

Le Président - Eh bien j'ai dit déjà dans une émission nationale télévisée, il y a 48 heures, que je pensais qu'il y avait une mauvaise information. Quand il y a mauvaise information, il faut s'en prendre à qui? A ceux qui devraient informer mieux ou à ceux qui n'ont pas voulu entendre les explications? Je n'en sais rien, je ne suis pas là pour démêler les responsabilités. Ce qui est vrai, c'est que, quand a été invité le Sommet des pays industrialisés à Paris, en même temps sont parties les invitations pour le Bicentenaire à un certain nombre de pays, mais pas en aussi grand nombre que ceux qui étaient là. Nous n'avions pas vu si grand. Mais très rapidement nous nous sommes aperçu que nous devions contenir le souhait très flatteur exprimé par beaucoup de pays d'être présents auprès de la France pour célébrer ce grand événement.

Il y a eu 35 invitations acceptées ou sollicitées et 34 présences. On a dit 33 parce que M. HILLERY, Président de l'Irlande, n'est arrivé qu'en cours de cérémonie...donc 34, et l'un des 35 était empêché par des problèmes intérieurs, il s'agissait de l'Argentine, qui avait accepté.

Il y a eu en France un certain nombre de protestations, de manifestations. La presse y a largement collaboré...Eh bien moi, j'ai pris cela comme cela venait...Je suis un peu habitué. Il est vraiment rare qu'une initiative soit saluée par un concert de vivats ou de bravos. C'est très rare...C'est encore une chance quand aprés coup les lazzi se transforment...en bravos. Mais on a constaté qu'un certain nombre de choses peuvent être réussies et utiles.

Alors je n'en pense rien, je prends les choses comme elles sont. Ce qui compte pour moi, c'est le résultat.

21 pays pauvres ou intermédiaires étaient présents à Paris. Quelques pays d'Europe, type Irlande, Portugal ou Grèce, non membres du Sommet se sont joints à nous, ainsi que les 7 pays industriels, disons les 6 autres. Il y avait aussi la Communauté Européenne, pendant deux jours et demi, cela a été le Bicentenaire où tous avaient droit aux mêmes égards et ont participé aux mêmes manifestations. A partir du 14 après-midi, le Sommet a commencé. Il y a donc eu quelques heures pendant lesquelles tout se trouvait imbriqué dans le mouvement général et à partir du 15 au matin, il ne restait plus que le Sommet des Sept.

Je crois que cette conjonction a été ressentie, en tout cas par les participants, les uns et les autres, comme utile, comme une bonne chose.

Quant à l'opinion sur le fait d'avoir réuni des riches au moment d'un 14 juillet qui a été la victoire du Tiers Etat, c'est une observation qui mérite examen. Mais je ne peux pas non plus en vouloir aux pays démocratiques qui doivent peut-être une partie de leur prospérité à leur démocratie.

Je ne vois pas pourquoi je sanctionnerais la Grande-Bretagne et les Etats-Unis d'Amérique qui, avant même la France, avaient déclenché le mouvement en faveur des Droits de l'Homme ou l'Etat du MASSACHUSETTS qui avait dessiné dans sa constitution quelques-unes des grandes lignes de ce qui fut la nôtre, ou plutôt la Déclaration des Droits de l'Homme. Au nom de quoi les écarter?

D'une part les grands pays industriels sont des grandes démocraties, ils avaient leur place. D'autre part tous les pays du Tiers Monde ne sont pas d'angéliques démocraties, mais ils ont pour eux d'être pauvres et de vouloir aspirer à la prospérité. C'est donc un phénomène très révolutionnaire constaté chaque fois qu'il s'est produit des grands tournants dans l'histoire de l'humanité...Non, moi je me suis senti à l'aise avec tous et j'ai été heureux qu'ils fussent là les uns et les autres.

Question - Monsieur le Président, je voudrais revenir sur la déclaration politique concernant la Chine, Une dépêche officielle de l'Agence de presse Chine Nouvelle a annoncé le 11 juillet que la France avait versé 83 millions de francs à l'état chinois.

Qu'en est-il de ce versement? Pensez-vous qu'il soit en cohérence avec la déclaration politique d'hier concernant la Chine?

Le Président - Je n'étais pas du tout au courant. Ce n'est pas la France qui a versé cet argent, il a été versé vraisemblablement par une institution particulière et certainement en application d'accords antérieurs. Nous n'avons pas décidé le non-respect des contrats. Donc je ne peux pas vous répondre autrement parce que je n'en sais rien. Je l'ai simplement entendu ce matin à la radio, avec un petit peu de surprise, et je dois dire un certain mécontentement. Je réserve mes observations à qui de droit après.

Dans les conditions où je viens de vous le dire, ce n'est pas scandaleux. Mais les décisions qui ont été prises, que la France avait déjà prises, tendent naturellement à observer dans ce domaine une retenue qui n'aurait pas été illustrée par le versement en question, mais je ne peux pas me prononcer sur un sujet que je ne connais pas assez.

Question - Monsieur le Président, ma question porte également sur la Chine.

Dans la déclaration politique, les Sept ont dit qu'ils voulaient qu'il y ait un délai pour les prêts de la Banque Mondiale à la Chine.

Dans quelles conditions les Sept seraient-ils favorables à ce que la Banque Mondiale reprenne les prêts?

Le Président - Cela n'a pas été dit. Je pense que cela dépendra de l'évolution intérieure de la Chine.

Nous avons fixé une politique restrictive pour marquer notre désaveu de ce qui s'est passé là-bas mais nous n'avons pas déjà prévu le moment où l'on pourrait changer d'attitude en raison de l'évolution intérieure de la Chine.

Je pense que si les faits qui ont commandé ce retrait demeurent semblables à eux-mêmes, cela ne permettra pas un retour.

Cela se discutera avec la Banque Mondiale dans les semaines qui viendront.

Question - Les 54 articles contenus dans cette déclaration concernent beaucoup de monde, beaucoup de pays dans le monde, surtout des pays en voie de développement. Pour les mettre en application, pensez-vous que les organismes internationaux peuvent jouer pleinement leur rôle, ou faut-il que la France, qui assure la Présidence, maintienne le contact avec tous ces pays pour mettre en applications ces articles-là?

Deuxièmement, est-ce que vous pensez qu'on va faire des consultations régulières entre pays en voie de développement et pays riches, avant chaque sommet des Sept?

Le Président - Les pays réunis au Sommit de l'Arche disposent d'une certaine influence sur les grandes institutions internationales, car ils y contribuent puissamment. Ils pourront donc faire connaître directement, comme ils l'ont déjà fait à la Banque Mondiale et au Fonds Monétaire International, les orientations qui sont les leurs.

J'ai déjà indiqué tout à l'heure, dans ce long document que j'ai résumé, et non pas commenté, que sur 7 ou 8 points extrêmement concrets ces grandes institutions accompliront un certain nombre d'actes positifs, notamment dans la manière de traiter la dette, de la réduire, de l'échelonner, ou de préparer les temps nouveaux, c'est-à-dire d'alimenter la reprise économique de ces pays par de l'argent frais.

Il conviendra de suivre, de persévérer, de continuer dans cette voie.

Les décisions politiques qui sont prises par les Etats ou par l'Assemblée Générale des Etats et les institutions particulières, aussi importantes qu'elles soient, doivent s'inscrire dans cette volonté politique.

Il faut donc veiller à ce que la volonté politique soit maintenue et renforcée.

C'est pourquoi j'ai, en tant que Président Francais, l'intention de poursuivre mon action:

1 ) pour qu'il n'y ait pas de relâchement

2 ) pour qu'on aille plus loin.

Question - Au cours du Sommet, vous avez exprimé très clairement vos préoccupations sur le problème de la dette et vous avez même déclaré l'autre jour que le Mexique était au bord d'une explosion et qu'un aboutissement satisfaisant des négociations de New-York était une de vos principales priorités ici.

Mais la déclaration finale ne mentionne pas les négociations et il n'y a pas de support direct aux négociations de New-York.

Je voudrais savoir pourquoi, Monsieur le Président, ne craignez-vous pas de créer, de générer un phénomène de déception généralisée au Mexique et en Amérique Latine?

Le Président - Pour l'instant, ce sont les banques privées qui négocient leurs créances et il importe de connaître la position finale des banques privées avant d'ajouter autre chose. On ne peut pas séparer artificiellement banques privées et aides publiques, dans la mesure où l'on sait bien que, s'il y avait un krach mexicain plus prononcé, les banques en seraient elles-mêmes victimes et auraient tendance, même dans les pays les plus libéraux--mais cela, c'est une grande remarque purement personnelle--à se retourner du côté de la puissance publique. Donc, tout se tient.

Mais nous sommes dans une phase délicate et sensible, où il faut être extrêmement attentif. La discussion dure depuis quelques jours, avec des hauts et des bas. Rien ne doit venir la troubler. Je crois encore à ses chances de succès, sans pouvoir l'affirmer. Je considère ce règlement comme nécessaire, mais en raison de la concomitance de réunions sur la dette mexicaine et de la réunion du Sommet, toute intervention présente sur ce cas particulier (fort important, mais cas particulier) eut été imprudente.

C'est donc dans l'intérêt du Mexique qu'il n'a pas été jugé nécessaire d'adopter un texte, d'autant plus que d'heure en heure, ce texte aurait pu se révéler dépassé. Voilà la raison, ce n'est pas une raison de fond.

Question - Nous avons pris acte de la ferme volonté des participants à ce XVème Sommet de développer un autre type de coopération avec les pays en développement mais nous constatons que plus vous développez ces pays, plus ils sont sous-développés.

Est-ce que vous ne faites pas qu'appliquer cette parole de l'Evangile, prêchée, il y a quelque deux cents ans environ par vos missionnaires...

Le Président - Ce n'était pas les miens!

Question - ..."à celui qui n'a rien, il faut rendre même ce qu'il n'a pas?"

Le Président - C'est un très beau précepte, mais c'est un précepte moral et la morale ne s'est pas encore totalement substituée à la politique.

Cependant, tous les responsables du monde qui représentent de vraies civilisations savent bien que cette obligation morale doit, d'un jour à l'autre, se confondre avec les obliations politiques.

Donc, c'est un très beau précepte, pas commode à mettre en ouevre...Vous voyez la tournure paradoxale prise précisément non pas par les missionnaires, mais par leur Maître, leur inspirateur, le Christ, à savoir: il faut donner même ce que l'on n'a pas! C'est une forme paradoxale qui dit bien ce qu'elle veut dire et que vous avez parfaitement comprise. C'est même un très beau précepte. Cela veut dire qu'il ne faut pas mesurer son effort lorsqu'il y a des gens en perdition. C'est ce que je pense.

Il reste bien entendu à créer un courant international, conforme aux voeux que vous exprimez.

Question - M. le Président, c'était le premier Sommet du Président Bush. est-ce qu'au changement d'homme a correspondu, à votre avis, un changement politique?

Le Président - Vous savez, je ne vais pas me livrer à des comparaisons extrêmement délicates et je ne veux pas embarasser ceux dont nous parlons.

Un changement d'homme, c'est forcément un changement d'approche. Pas forcément un changement de politique. A quoi cela servirait de changer les hommes d'ailleurs?... si les démocraties ont prévu un terme à tous les mandats, au contraire des monarchies, c'est bien parce qu'il est bon de changer!

Donc je ne me situerai pas par comparaison avec M. REAGAN que j'ai rencontré huit fois, c'est-à-dire pendant huit ans (il s'agissait pour moi de mon IVème Sommet).

Je dirai que M. BUSH montre beaucoup d'ouverture d'esprit, beaucoup d'affabilité dans ses relations personnelles, un désir de réussir une bonne entente entre les pays ici réunis, et cette ouverture d'esprit de M. Bush qui connaît bien les p[roblèmes de l'Europe et les problèmes du monde en raison de ses états de service antérieurs, me paraît de très bonne augure.

Question - M. le Président, est-ce que vous considérez maintenant que le cadre des Sommets, tel qu'il est, est totalement satisfaisant? Convient-il de l'élargir? et si oui, dans quel sens?

Le Président - On peut toujours améliorer. Même si cela ne vous est pas apparu -à cause d'une part, du Bicentenaire, et, d'autre part, à cause des lieux dans lesquels s'est déroulé le Sommet, c'est à dire la Pyramide du Louvre et l'Arche qui sont des monuments nouveaux et qui donc attirent la curiosité. A l'intérieur de ces grands bâtiments, les conditions d'intimité, de tranquilité et de sérénité ont été réunies. On a bien travaillé entre nous, sans jamais être dérangés. Cela n'a pas toujours été le cas dans le passé.

Donc, de ce point de vue, je suis très satisfait de la tournure prise par les Sommets, dont l'initiative qui est celle de M. GISCARD D'ESTAING, en 1975, a été précisément décidée afin que les responsables du monde qui se réunissent, se connaissent, se connaissent mieux.

Et puis, peu à peu, la présence de la presse, de plus en plus massive--cette fois-ci plus de 6 000 journalistes--l'effet médiatique, l'intérêt, les discussions passionnées, ont fait qu'il était difficile de préserver cette intimité de la relation directe entre les personnes. Mais je crois que le tir a été corrigé, depuis déjà quelques années suffisamment pour que l'on puisse juger de façon parfaitement acceptable la manière dont cela se déroule.

Il y a quelquefois une tentation de se mêler de tout ou de décider pour tous. Mais nous avons réussi à la surmonter et vous remarquerez que chaque fois qu'il s'agit d'initiatives nouvelles, il est écrit: "les pays réunis au Sommet, t tous autres pays intéressés, sont appelés à..." c'est à dire qu'il y a une ouverture des membres du Sommet sur les pays absents que l'on espère présents, sinon dans les Sommets, du moins dans la mise en oeuvre de politiques nouvelles, sur lesquelles ils auraient le même droit d'évocation et d'initiative que nous. C'est vrai de l'environnement en particulier.

Question - La lettre que vous a adressé M. GORBATCHEV montre assez qu'il souhaiterait être associé au règlement des grandes affaires du monde. Est-ce qu'il vous paraît concevable qu'il puisse participer un jour à un Sommet tel que celui qui vient de s'achever ici à l'Arche?

Le Président - L'Union Soviétique est un très grand pays qui joue un rôle considérable dans le monde. Il est l'une des deux plus grandes puissances militaires de la planète, donc son rôle est éminent.

Les pays qui se rassemblent au sein du sommet des Sept sont des pays dont la définition de base est la démocratie, assortie d'institutuions adéquates, d'institutions démocratiques.

L'un de ces pays deviendrait par malheur--c'est tout à fait imprévu--un pays qui s'éloignerait de la démocratie, il n'aurait plus sa place dans ces Sommets.

Les pays qui évoluent vers la démocratie, qui n'ont pas encore défini des règles d'existence démocratiques chez eux au même point ou nous y sommes parvenus au travers d'institutions et des pratiques car il n'y a pas que les institutions, il n'y a pas que ce qu'on écrit, il y a ce qu'on fait. Quel que soit l'intérêt remarquable que j'attache à l'évolution de l'Union Soviétique, sur le plan de l'éthique politique, nous n'en sommes pas au même point, nous n'en sommes pas là.

Quant à la valeur des Sommets économiques, puisque c'est leur nom, il semble également qu'un certain nombre d'événements doivent se produire pour que le dialogue soit fructueux au sein de ces Sommets. Je ne parle pas du dialogue à longueur d'année qui est tout à fait nécessaire.

Quant à me poser une question de caractère général: "pensez-vous qu'un jour cela soit possible?"....Bien entendu. Et je ne parle pas spécialement de M. GORBATCHEV; je parle de son pays, comme d'autres pays qui devraient connaître une évolution, un progrés économique, et un progrès démocratique suffisants pour que cela soit possible.

Une observation de pure pratique: ces pays étaient cinq, ils sont maintenant sept. Un trop grand nombre rendrait plus difficiles les échanges de vues, mais en soi il n'y a pas d'obstacles à la perspective que vous venez de préciser.

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Source: Publi au Sommet de l'Arche


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